La collecte de fonds menée en 2015 et début 2016 par le Fonds de dotation de recherche sur l’hémophilie (FRH) a permis de recueillir une somme suffisante pour que l’AFH finance un premier projet. En quoi consiste-t-il ?
Parmi les nombreux projets permettant de faire avancer la recherche dans le domaine des maladies hémorragiques rares, il fallait décider de l’axe de recherche à soutenir. C’est le groupe PHARE de l’AFH (pour « patients et parents concernés par les troubles de l’hémostase acteurs d’une recherche engagée »), groupe de réflexion dont les membres sont des patients et leurs proches, qui a décidé de :
- financer un projet portant sur de nouvelles stratégies thérapeutiques de l’hémophile ;
- concentrer la totalité de la somme disponible (50000€) sur le soutien d’un seul projet. Pas de dispersion entre plusieurs petits projets ;
- utiliser le financement pour le salaire d’un chercheur post-doctorant pendant un an dans une équipe déjà constituée et disposant des moyens nécessaires pour financer le fonctionnement du laboratoire.
Après diffusion d’un appel à projets vers la communauté scientifique, l’AFH a reçu en réponse deux projets, qui ont été expertisés sur le plan scientifique. Ils ont été jugés tous les deux de bonne qualité scientifique et proposés par des équipes reconnues dans le domaine. Les projets expertisés ont ensuite été soumis en décembre 2016 au CA de l’AFH, à qui est revenu le choix final.
Le projet retenu est celui présenté par Olivier Christophe, PhD, de l’unité Inserm U1176 à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre, intitulé « Small antibody fragments for subcutaneous treatment in haemophilia » (que l’on peut traduire par « petits fragments d’anticorps pour le traitement sous- cutané de l’hémophilie »).
L’approche décrite dans ce projet vise à traiter les patients hémophiles en proposant une stratégie innovante. Elle est basée sur la connaissance de la cascade de coagulation : lorsqu’il y a une blessure, la coagulation s’active et il y a alors une balance entre facteurs de coagulation, qui vont permettre la formation d’un caillot, et des freins à la coagulation, qui évitent la survenue d’une thrombose.
Dans le cas de l’hémophilie, l’équilibre est rompu car il manque un facteur de coagulation (FVIII ou FIX). Les traitements actuels viennent remplacer ce facteur manquant.
Le projet d’Olivier Christophe vise, quant à lui, à rétablir l’équilibre entre facteurs de coagulation et freins, non pas en injectant les facteurs manquants mais en apportant un nouveau type de médicament (nonabodies ou petits fragments d’anticorps) permettant de lever les freins et donc de créer un nouvel équilibre de la balance.
L’intérêt de ce type d’approche est de rétablir la coagulation chez les patients hémophiles sans injection de FVIII ou de FIX. Ceci présente un double avantage : d’une part, cette solution n’entraîne pas la production d’anticorps chez certains malades, permettant ainsi de traiter les patients hémophiles avec inhibiteurs ; d’autre part, hémophiles A et B peuvent être traités avec le même médicament. De plus, le produit peut être administré par injection sous- cutanée et sa demi-vie est plus longue que celle des facteurs de coagulation actuels. Il est théoriquement moins cher à produire et le fait de traiter tous les malades avec le même produit devrait permettre des économies d’échelle au stade de la production.
L’AFH a jugé que ce projet original pourrait apporter des bénéfices à tous les patients hémophiles A et B, avec ou sans inhibiteurs, et, on l’espère, à moindre coût. Cependant, le soutien financier apporté par l’AFH ne finance le projet que pour un an, durée insuffisante pour aboutir à des résultats concrets en matière de recherche. Cet élan apporté pour ce premier projet devra être consolidé non seulement par l’apport de nouveaux fonds destinés à le poursuivre, mais aussi à en initier de nouveaux.
Geneviève Piétu
Responsable du groupe de travail « Recherche »