Communiqué : Grand angle spécial hémophilie

Tribune de Nicolas Giraud, président de l’AFH

Favoriser l’accès aux soins pour tous

Elu à la présidence de l’AFH en juin dernier, Nicolas Giraud est le premier patient atteint de la maladie de Willebrand à occuper ce poste. Un signe fort d’ouverture lancé à l’ensemble des patients atteints de maladies hémorragiques constitutionnelles (hémophilie, maladie de Willebrand, pathologies plaquettaires, etc.), soit 15 000 personnes en France, hommes et femmes.

Certes, l’hémophilie concerne majoritairement les hommes, mais on estime que 2 000 femmes conductrices de la maladie ont des taux de facteur VIII ou IX bas et sont aujourd’hui considérées comme des hémophiles mineures. Elles sont confrontées à de nombreuses problématiques (puberté, grossesse, hémorragies, etc.) et gynécologues, hématologues et généralistes et doivent y être sensibilisés.

Malgré les avancées thérapeutiques considérables enregistrées pour l’hémophilie, les autres troubles de la coagulation ne bénéficient à ce jour d’aucune innovation majeure. Aujourd’hui, la maladie de Willebrand est encore traitée par des dérivés plasmatiques, alors que des protéines recombinantes sont accessibles aux Etats-Unis. D’autres pathologies comme le déficit en facteur V ne se traitent qu’avec du plasma.

Notre action doit passer par un engagement associatif aux côtés des chercheurs. Une commission et un fonds dédiés ont permis à l’AFH de récolter des fonds et de lancer un appel à projets sur la maladie de Willebrand. Des groupes de travail patients-scientifiques feront émerger les besoins des malades pour mieux orienter les recherches. Cette méthode en cours d’évaluation pourrait être appliquée aux autres pathologies.

Un accès aux soins pour tous passe aussi par d’autres axes de travail : favoriser l’éducation thérapeutique, lutter contre les disparités territoriales, notamment en outre-mer, en raison du manque de structures ou de professionnels spécialisés, etc. Sur tous ces dossiers, nous collaborons avec l’ensemble des acteurs (DGS, ANSM, ARS, filière MHEMO, associations, industrie pharmaceutique).

Enfin, nous n’oublions pas les patients qui souffrent et ont un accès insuffisant, voire aucun accès, aux soins partout dans le monde et nous mettons en place des partenariats et des jumelages pour faire bouger les lignes. C’est tous ensemble que nous parviendrons à faire progresser la cause des patients, de tous les patients.

Éduquer

Aider les personnes qui vivent avec une maladie hémorragique rare

Pour toute maladie chronique, l’adhésion aux traitements et la vie avec la maladie sont des problématiques récurrentes.

Thomas Sannié, président d’honneur de l’Association française des hémophiles (AFH), et Sophie Ayçaguer, chargée de mission Education thérapeutique, en expliquent les enjeux et leur action dans les maladies hémorragiques rares.

Depuis quand l’AFH s’implique-t-elle dans l’éducation thérapeutique du patient (ETP) ?

Les premières formations ont eu lieu en 1974 pour accompagner l’arrivée des traitements à domicile. S’ils apportaient autonomie et rapidité de prise en charge des accidents hémorragiques, ils nécessitaient une formation à l’administration en intraveineuse. Les formations ont permis aux patients d’identifier quand et comment se traiter.

Quelle est la place des professionnels de santé dans l’ETP ?

En fait, l’ETP repose sur la co-construction entre professionnels de santé et patients : c’est la clé d’un contenu pédagogique efficace et d’un apprentissage sur les contraintes des uns et les attentes des autres. Pour favoriser cette coconstruction, de 3 à 4 réunions de travail nationales, d’une journée, réunissent chaque année professionnels et patients. L’interdisciplinarité est une valeur fondamentale en ETP.

Comment l’ETP a-t-elle évolué ?

Les évolutions ont été nombreuses. La loi HPST (Hôpital, patients, santé, territoires) a fait évoluer les formations, devenues plus structurées. De leur côté, les professionnels se sont tous, en principe, formés à l’ETP. L’AFH a, quant à elle, développé le patient parent ressource – réel médiateur formé, lien entre le savoir soignant et le savoir expérientiel, c’est-à-dire tiré de l’expérience des patients – qui intervient avec le professionnel de santé dans les séances éducatives. Les traitements ont connu des innovations constantes. La prochaine avancée concerne les traitements en souscutané actuellement à l’étude. Ils pourraient améliorer la prise en charge prophylactique des accidents hémorragiques et pourront transformer des hémophilies sévères en mineures. Leur quotidien pourrait être révolutionné. L’ETP aura un rôle fondateur pour apprivoiser cette nouvelle vie et ses possibles, comme pratiquer une activité physique adaptée ou faire évoluer ses activités de loisirs et professionnelles…

Quelle évolution ont suivi les outils d’ETP ?

HémoMooc, le premier Mooc conçu pour et par les patients sur des modèles pédagogiques empruntés à l’ETP, informe et forme les personnes concernées par l’hémophilie mineure: elles doivent savoir agir face à des hémorragies moins fréquentes, mais tout aussi graves. Fondée sur ces contenus, une application est en cours de création. Dématérialiser le carnet de santé est également un nouvel enjeu pédagogique pour faciliter le suivi, tout en optimisant son format papier pour ne laisser personne de côté. Le développement du numérique renouvelle et interroge la créativité dédiée jusqu’à maintenant à l’ETP.

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